Covid-19 oblige, l’infetologue Didier Raoult est au centre de toutes les conversations en France et dans le monde. Je suis l’un des rares journalistes qui le connaissent bien et suivent son chemin (j’ai même écrit un livre sur son hôpital et ses recherches sur les maladies infectieuses*). Portrait d’un médecin fantastique tel qu’il était original.
Avec sa crinière blanche, sa barbe touffue et ses chemises improbables nichées sous son éternel chemisier blanc, le professeur Didier Raoult n’est pas tout à fait le chef du travail. Sous son air de troubadour de retour de Woodstock dans un combi Volkswagen, l’un des meilleurs scientifiques français et l’un des chercheurs les plus cités au monde est caché. La voie thérapeutique qu’il a présentée pour lutter contre Covid 19 a été appelée « fausses nouvelles » sur le site web du ministère de la Santé il y a trois semaines. Mais le ton du gouvernement et de la communauté scientifique change !
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Bien qu’ils recueillent des découvertes, des prix et des publications prestigieuses depuis plus de 30 ans, Didier Raoult et son équipe ont parfois du mal à être pris au sérieux dans la première place. Mais son amertume au combat lui permet souvent de ramasser le nez et la barbe de ses critiques. L’épidémie de coronavirus sera-t-elle un nouvel exemple ?
Révélé au grand public par ses chroniques dans « Le Point » et quelques livres à succès (1), le professeur Didier Raoult est avant tout un infetologue et virologue de renommée internationale. Sa carrière extraordinaire, l’a construit pour la première fois sur la recherche, avec à son actif quelques découvertes importantes telles que des virus géants (mimivirus, marseillevirus…), l’identification de plus de 100 nouvelles bactéries pathogènes ou l’identification du rôle de certains micro-organismes dans des maladies telles que la fièvre Q, Maladie du fouet, endocardite ou lymphome non hodgkinien. Mais Didier Raoult est aussi, et surtout, un, un chef d’équipe — un chef de gang disent même certains de ses proches — avec autour de lui une cohorte de scientifiques de haut niveau qui ont commencé à se rassembler il y a plus de 35 ans et qui ont depuis été à lui sont restés fidèles. À ce noyau dur de débuts, il a toujours su ajouter de nouveaux talents, repérés au fil du temps parmi les étudiants qui se précipitent à ses cours et dans ses ateliers à la Faculté de Médecine de La Timone. Un succès d’autant plus extraordinaire qu’il n’a pas été joué à Paris, Washington, Londres ou Shanghai, mais à Marseille, où les équipes de chercheurs de calibre mondial ne sont pas encore légions.
Ouverte hors de la norme !
Né au Sénégal il y a 68 ans d’une mère allaitante et de médecin militaire, Didier Raoult est devenu un médecin plus hors service que passion. Débarqué à Marseille à l’âge de 10 ans, il part à l’âge de 18 ans pour embarquer comme marin sur un navire marchand.convaincu que son destin aurait le goût salé des aventures maritimes. Le temps de réaliser le travail de l’équipe gonfle les biceps mais se nourrit
L’Institut Hôpital Universitaire (IHU) Infection Méditerranéenne peu d’esprit, et voici à nouveau sur le Vieux Port, tête et ambition en berne. Son père, qui avait déjà conditionné son autorisation à embarquer après avoir obtenu son baccalauréat, a ensuite mis le marché entre ses mains : c’est un médicament ou rien. « J’avais un diplôme littéraire. Aujourd’hui, je ne pouvais même pas retourner à l’école de médecine avec ça », s’est-il amusé aujourd’hui. Autrefois lieu dentroil, le jeune Raoult est passionné. Au cours de ses études, il a développé un goût fort pour la recherche et les maladies infectieuses et tropicales, qu’il a découvert à l’université puis pendant son service militaire à Tahiti. Son premier laboratoire de recherche, créé en 1984 après une première entreprise : le développement d’unefficace pour la culture des bactéries. C’est avec cette « unité de rickettsia » qu’il a commencé à construire son équipe. Michel Drancourt et Philippe Brouqui l’ont rejoint depuis. Puis Philippe Parola, Bernard La Scola, Jean-Marc Rolain, Pierre-Edouard Fournier, tous devenus professeurs et investis dans le grand travail de Didier Raoult : l’Institut hospitalialo-universitaire (IHU) Méditerranée Infection, l’un des six IHU créés au cours de la dernière décennie, aujourd’hui à l’avant-garde dans de nombreux domaines de recherche. Dont, bien sûr, le coronavirus, avec les espoirs doigté efficace né du travail des scientifiques chinois et de l’équipe de IHU Marseille.
Chef de l’un des 6 IHU créés en France !
Pour y arriver, Raoult n’a jamais cessé de se battre. Tout d’abord parce qu’il aime ça. La confrontation, la confrontation, la controverse… sont pour lui des contextes inspirants. Son talent, ses connaissances et sa capacité à travailler ensembleles gens l’ont souvent aidé à gagner. Et la coquille qu’il a construite au fil du temps l’a toujours protégé des critiques et des interrogations. « Il a un niveau très élevé et très stable d’estime de soi », explique l’un de ses proches pour localiser le personnage, souvent décrit comme arrogant, fragile ou même méprisant par ses critiques. Il est vrai que peu de gens l’ont impressionné et qu’il prend peu de précautions pour dire ce qu’il pense les uns des autres, surtout ceux et ceux qui ont des pouvoirs qu’il juge exorbitants ou illégitimes. Son IHU vient d’être inauguré, elle s’est donc heurtée à Yves Lévy, alors chef de l’Inserm (2), qui était également mari du ministre de la Santé de l’époque, Agnès Buzyn. Résultat : Bien qu’il soit l’un des centres de recherche les plus prolifiques du pays, Méditerranée Infection n’a pas le label Inserm. Elle n’a pas non plus celle du CNRS (3), peu ou plus pour les mêmes raisons. Ça ne l’empêche pas de toujours produire une bonne science. Et pour donner de l’aciditéà tous ceux qui voudraient le voir trébucher, à Paris mais aussi à Marseille, où son succès insolent suscita toujours la jalousie et nourrit des querelles de palais parmi les mandarins qui n’avaient ni son talent ni ses compétences d’union, mais qu’ils auraient aimé avoir ses moyens.
Crédibilité internationale…
Didier Raoult s’est appuyé sur le travail d’un de ses collègues chinois pour mettre au point un traitement qui traiterait la grande majorité des patients auxquels il avait été administré. Abonné aux revues scientifiques les plus prestigieuses, telles que Nature ou Science, il signe ou cosigne chaque année une centaine d’articles et apparaît de manière systématique dans le trio de chercheurs français en termes de production scientifique. Sauf que son regard, son franc discours et son identité marseillaise l’ont toujours servi. Il se fiche d’une guigne. Quel que soit le sujet, les faits souventfinissent en faveur de lui, même si ses déclarations ont été immédiatement battues en violation par des armées de pseudo-experts. Ceux qui peuvent avoir du mal à admettre que les gens de Marseille peuvent être parmi les meilleurs spécialistes dans le monde de l’infection.
Wickly aimait Infrance
Cette situation a été observée à la fin de février lorsque Didier Raoult a présenté la chloroquine comme traitement potentiellement efficace du coronavirus. Utilisée depuis le milieu du XXe siècle dans le traitement du paludisme, cette molécule très bon marché pourrait-elle être une arme décisive contre une nouvelle maladie virale ? « Certainement pas ! », a déclaré toute une cohorte de médecins autoproclamés et d’experts de la radio et de la télévision. En commençant par le même ministère de la Santé, qui a attaché le label « fausses nouvelles » aux annonces de Didier Raoult pendant plus d’une journée, parce qu’un journaliste d’un grand journal national les a fait décrireen tant que telle. Trois semaines plus tard, patate ! Pour donner plus de valeur aux commentaires échangés devant les caméras qu’à l’analyse de l’un des infetologues les plus célèbres au monde, le ministère de la Santé a ses pieds dans le tapis. Tout comme le directeur général des Hôpitaux d’Assistance Publique de Paris (APHP), qui n’a pas eu assez de mots contre Didier Raoult fin février sur le micro des chaînes d’information.
Un défilé contre Covid 19 ?
Aujourd’hui, la prudence reste élevée, mais nous veillons à ne pas faire les mêmes commentaires dédaigneux. « Ce que je disais à l’époque ne m’a pas spontanément poussé dans la tête », dit Raoult. Ceci est basé sur deux choses : d’une part mon expérience, car ici à Marseille, nous utilisons de l’hydrxychloroquine dans le traitement des infections bactériennes depuis plus de 25 ans. D’autre part, le travail du professeur Zhong Nanshan, l’un de mes plus brillants collègues chinois, qui a parléde l’efficacité de la chloroquine lors d’une conférence de presse le 17 février. » Sauf que Secondoraoult, « à Paris, a du mal à admettre que la France n’est plus le phare de la science mondiale et que les chercheurs les plus réussis aujourd’hui se trouvent en Asie du Sud-Est et plus encore en Occident ». Les déclarations de l’infétologue chinois n’ont pas été diffusées en France.
Dans un essai clinique ultérieur, les résultats obtenus à IHU Méditerranée Infection se chevauchent avec ceux de Zhong Nanshan, confirmant l’efficacité de la chloroquine dans le traitement du coronavirus. Mieux : Combiné à un ancien antibiotique, l’azithromycine, la chloroquine non moins ancienne du coronavirus a éliminé plus de 90% des porteurs inclus dans l’essai clinique de Marseille. « Et cette combinaison des deux molécules, nous l’avons inventée ! », dit Didier Raoult, prêt à traiter tous les patients qui viennent à finir démontrer l’intérêt de ce cocktailmedicamentous.
Parce qu’il estest-ce nécessaire pour mettre fin à la critique et les autorités françaises croient enfin que vos déclarations ont un sens ?
Guerre de position
« Le problème – dit l’infectivologiste – est qu’intellectuellement ils ont de la difficulté à admettre qu’une nouvelle maladie, un nouveau virus, peut être traité efficacement par de vieilles molécules qui ne coûtent rien, et non d’une nouvelle entreprise de recherche pharmaceutique, qui est très coûteux et très compliqué à industrialiser ».
Raoult sait de quoi il parle. Pendant des années, il a préconisé une refonte des modèles économiques de la santé afin que toutes les molécules existantes, principalement créées au XXe siècle, soient considérées comme un patrimoine au service de l’humanité. « Ce n’est pas le cas aujourd’hui, dit-il, parce que nous abandonnons les médicaments qui ne signalent rien, même s’ils sont efficaces. C’est ainsi que les antibiotiques ne sont plus produits en Occident et nous avons régulièrement une pénurie dedes molécules très importantes, comme la doxycycline récemment, qui n’est pas disponible pendant 6 mois quand nous en avons besoin tous les jours pour traiter les gens. »
Toute la question reste avec le coronavirus : si l’efficacité de la combinaison chloroquine/azithromycine est confirmée, tout le monde sera en mesure de guérir, mais il n’apportera d’argent à personne. Un problème, vraiment ?
♦ *IHU Infection méditerranéenne — Le défi de la recherche et de la médecine intégrée. Ed Michel Lafon 2018.
Bonus
- Didier Raoult au Comité scientifique de crise — Créé le 11 mars par la volonté du Président de la République, un comité scientifique composé de 11 experts, chercheurs et professionnels de la santé a été créé. Sa mission, a expliqué un communiqué de presse du Ministère de la Solidarité et de la Santé, est « d’informer la décision publique dans la gestion de la situation sanitaire relative au coronavirus ». Le comité,présidé par le professeur Jean-François Delfraissy (immunologiste et président du Comité consultatif national d’éthique), il est composé de 11 experts, médecins et chercheurs. Les membres du comité qu’il dirige sont principalement des experts en épidémiologie et en infetologie. Ils « ont été choisis pour leur expertise reconnue en la matière, dans une approche pluridisciplinaire ». Denis Malvy est spécialiste des maladies tropicales à Bordeaux, Didier Raoult a effectué le premier test clinique d’hydroxychloroquine contre le coronavirus à Marseille et Yazdan Yazdanpanah est responsable du département des maladies infectieuses et tropicales à l’hôpital Bichat à Paris. Le comité comprend également le virologue Bruno Lina, directeur du Centre national de la grippe de Lyon, l’épidémiologiste de l’Institut Pasteur Arnaud Fontanet, Lila Bouadma, médecin spécialiste en réanimation, et le médecin citoyen Pierre-Louis Druais, fondateur du Collège de la médecine générale. Il y a aussi unépidémiologiste de modélisation, Simon Nightmare. Enfin, deux sociologues complètent cette équipe et lui apportent une touche « interdisciplinaire » : l’anthropologue Laetitia Atlani-Duault, qui a fait une thèse sur la prévention du VIH, et le sociologue Daniel Benamouzig, spécialiste de la politique sanitaire et de l’économie.
- Mini-entrevue — D’après les résultats obtenus par les patients inclus dans son premier essai clinique, Didier Raoult suggère que les autorités sanitaires changent leur stratégie pour un scénario « coréen ».
Qu’ est-ce que la Corée du Sud a fait ailleurs que la France pour endiguer l’épidémie ?
Ils ont choisi de tester massivement leur population et d’isoler uniquement les personnes infectées par le virus. Jusqu’à présent, cela leur a permis de contrôler la progression du virus sans limiter tout le monde. Nous devons être prudents parce que nous n’avons pas loin derrière, mais il est certain que les tests comme ils l’ont fait sont dansdernière analyse beaucoup moins cher que de mettre fin à l’ensemble de l’économie du pays.
Avons-nous la capacité technique d’effectuer des tests de masse en France ?
Il ne s’agit pas d’un problème technique ou médical. Ce n’est qu’une question de choix stratégique et d’organisation. Si nous le voulions, nous pourrions faire des tests très rapidement.
traitements avec lesquels vous avez obtenu des résultats encourageants peuvent-ils être généralisés rapidement ? Les
Les deux molécules que nous utilisons sont connues, peu coûteuses et faciles à produire. Sanofi a proposé 300 000 doses d’hydroxychloroquine (Plaquenil ou Nivaquine en sont les noms commerciaux, nr) aux autorités françaises pour ce traitement. D’autres tests seront effectués par d’autres équipes. Je suis presque sûr des résultats qu’ils obtiendront.
- Information — Didier Raoult se rend tous les jours sur le site du Morning Post de la Chine méridionale qui, selon lui,offre le meilleur résumé des nouvelles mondiales sur covid 19.
- Bibliothèque — (1) Parmi d’autres ouvrages : « Surmonter Darwin » (Plon — 2010), « Votre santé : tous les mensonges que nous vous disons et comment la science aide à voir clairement » (Michel Lafon — 2015), « Arrêtons d’avoir peur ! (Michel Lafon — 2016), « Mieux vaut guérir que prédire » (Michel Lafon — 2017), « La vérité sur les vaccins : tout ce qu’il faut savoir pour faire le bon choix » (Michel Lafon — 2018)
( 2) Institut national de la santé et de la recherche médicale.
( 3) Centre national de recherche scientifique.